Pour le sociologue Jacques Ion, voici la différence entre un engagement « timbre » et un engagement « post-it », qui résultent de la mutation des formes d’engagement militant depuis l’après deuxième guerre mondiale en raison de l’individualisation de la société : si le premier était caractérisé par l’adhésion au service de la cause envers laquelle l’individu accepte de déléguer sa parole et son identité pour se fondre dans celles définie par la structure, le second, réversible et pragmatique permet de bâtir l’identité de la structure du fait de l’aspiration et de l’ambition des militant-e-s qui s’y engagent.
Cela a un impact sur les corps intermédiaires, ceux qui disent « le réel – mais celui qui est invisible », ceux qui transforment les émotions en actions organisées mais qui subissent une désaffection progressive.
L’engagement timbre comprend 3 composantes : structure (comment : un syndicat), cause (quoi : quelles revendications) et temporalité (quand : sur quelle durée), l’individu s’engage intensément dans l’organisation pour une cause. L’engagement post-it se focalise sur la cause et la temporalité en délaissant la structure, par défiance.
Mais cette double catégorisation est insuffisante pour comprendre les mouvements militants climatiques, écologiques, féministes, de lutte contre les discriminations ou de justice sociale (où se situent les syndicats) initiés dès 2019. Si la part de l’individu y est forte avec le désir d’un épanouissement (sans que cela soit un engagement sacrificiel, au détriment de sa propre personne), les changements de transformation sociale, radicale et systémique sont d’une telle ampleur et urgence qu’ils se traduisent par un rapport d’indifférence face aux institutions, jugées trop lentes et déconnectées ou conduites par une génération qui a manqué d’exemplarité et n’aurait pas agi assez vite et assez fort.
Dans ce contexte les corps intermédiaires, comme les syndicats, ont besoin d’être pour les militant-e-s des lieux d’expression démocratique à l’écoute et bienveillants qui leur permettent également de définir la structure. Le SIT est un lieu qui est traversé par cet esprit, mais qui devrait aussi être reconnu comme un outil de transmission d’une culture politique commune (celle des travailleuses et travailleurs), pour faciliter l’échange et le dialogue et construire un cadre collectif de références partagées permettant de porter le changement.
Diego Cabeza