Ça pourrait s’apparenter à un roman d’espionnage dans lequel les protagonistes avancent pas à pas dans l’intrigue.
Sur un vieux télex crépitant une dépêche de presse tombe le 20 décembre avec une bombe journalistique : « La Confédération a conclu un accord avec ses voisins européens ! » Mais les consultations et négociations de politique intérieure doivent encore prendre place dans le pays. Pour la faîtière des syndicats suisses, notamment au sujet de la protection des salaires, il faudra compenser les détériorations liées à l’accord présenté. Une assemblée extraordinaire des délégué-e-s est convoquée aussitôt pour le 31 janvier. Il faut montrer les dents, syndicalement.
Les informations sont manquantes, les textes définitifs des 12 domaines sur lesquels portent les accords, ne sont pas disponibles, uniquement sous la forme résumée de « fiches d’information », mais apparaissent déjà les premières failles : outre la protection des salaires, le transport, l’électricité, les aides d’état, ça va faire mal (comme partout où le libéralisme passe !).
Une résolution doit voir le jour, le texte est sollicité de la centrale mais tarde à venir pour que les composantes syndicales locales puissent se positionner. Le 30 janvier, en début de soirée la version qui devra être votée le lendemain est là. Votre syndicat (et quelques autres) s’attèle à la compléter : mentionner en préambule la dérive néo-libérale européenne, les replis identitaires et xénophobes, réaffirmer le soutient à la libre-circulation, le droit au séjour et à l’égalité des droits sociaux des travailleuses et travailleurs, afin de préserver leur capacité à résister ensemble aux abus patronaux ; rappeler les mesures d’accompagnement insuffisantes, la sous-traitance du travail temporaire issu des politiques patronales ; rajouter des revendications à la liste comme l’édiction facilitée de CTT, les mesures de protection salariales compensatoires dans le cadre de sous-enchère envers les femmes et les minorités de genre, la primauté des salaires minimaux cantonaux…
Mais le lendemain, dès 14h à Berne, les interventions sont limitées, le texte bien qu’amendé incomplet, car tout doit être prêt pour 16h, la presse est là : caméras, micros et appareils photo attendent… Ça ressemble à une assemblée participative, mais l’adoption démocratique du texte final est escamotée par l’urgence médiatique du moment…
L’affaire n’est pas finie, la suite reste à venir, donc !
Diego Cabeza