Archi en colère

Le 14 octobre, à l’occasion d’une Assemblée générale, des jeunes architectes mobilisé-e-s ont dénoncé la signature d’une CCT indigne entre les patrons et le syndicat SYNA.

Coup bas ● « Indigne », « illégitime », « dégueulasse », les membres du comité « Archi en colère » n’ont pas de mots assez durs pour qualifier le jeu auquel se prêtent l’association patronale des bureaux d’architectes genevois (AGA) et le syndicat SYNA. Le jeu ? Signer une convention collective de travail au rabais dans le dos des syndicats légitimes du secteur que sont le SIT et Unia. Le comité « Archi en colère » ? Un groupe de jeunes architectes scandalisé-e-s par cette démarche, qui ont décidé de riposter par la mobilisation.

CCT dénoncée

Petit retour en arrière. Voilà des années que l’AGA freine des quatre fers à toute amélioration substantielle de la CCT genevoise des bureaux d’architectes. Résultat, des salaires minimaux scandaleusement bas (archi bachelor au salaire minimum légal, et autres fonctions même en dessous de celui-ci). Lassés de cette situation, les syndicats signataires de cette CCT, le SIT et Unia, décident en début d’année de la dénoncer, de manière à faire pression sur l’AGA pour qu’elle entre en matière sur les revalorisations salariales et les mécanismes d’indexation exigées par les syndicats.
Une stratégie d’autant plus justifiée que les salaires réellement pratiqués dans les bureaux d’architectes semblent se situer (fort heureusement), largement au-dessus des salaires minimaux de la convention. Mais du coup, la CCT, fixant donc un référentiel salarial beaucoup trop bas, ne peut plus remplir son rôle de mécanisme de lutte contre la sous-enchère.

Patrons cherchent syndicat conciliant

Qu’à cela ne tienne, les patrons cherchent alors un syndicat plus conciliant pour resigner la CCT. Et le trouvent vite : le 30 mai, l’AGA et SYNA publient un communiqué annonçant en grandes pompes la signature d’une « nouvelle CCT » prévoyant notamment « une revalorisation de la grille salariale et d’autres conditions de travail ».
Or, non seulement cette « nouvelle CCT » est rigoureusement identique à celle dénoncées par le SIT et Unia, mais en plus certains patrons invitent alors de manière appuyée leurs employé-e-s à devenir membres de SYNA afin de renforcer sa représentativité. Questionné par les autres syndicats sur l’absence de mandat donné par les travailleurs-euses à SYNA pour signer cette CCT, SYNA-Genève répondra naïvement que ce sont les patrons qui sont venus les chercher…

Pétition et résolution

Outré-e-s par cette démarche, un groupe de jeunes architectes s’est constitué en comité, avec l’appui du SIT et d’Unia, pour tenter d’y riposter par la mobilisation de leurs collègues. Le comité a lancé une pétition demandant notamment à l’État de procéder à une enquête salariale dans le secteur, aux signataires de la « nouvelle » CCT d’y renoncer, et au SIT et à Unia d’organiser une assemblée générale destinée à établir un cahier de revendications dans ce nouveau contexte.
Cette assemblée a eu lieu le 14 octobre, et a réuni plus de 50 travailleurs-euses ultra-motivé-e-s. Une résolution a été adoptée à l’unanimité réaffirmant les demandes de la pétition, définissant le cahier de revendications, et mandatant le comité « Archi en colère » et les syndicats SIT et Unia afin de poursuivre le combat.
La pétition, munie de 1136 signatures, a ensuite été déposée auprès du Département de l’économie et de l’emploi, tandis que dans l’intervalle, sous pression de cette mobilisation, l’AGA et SYNA ont convenu d’un avenant salarial reprenant partie des revendications que l’AGA avait initialement refusé d’accorder au SIT et à Unia.
Affaire à suivre…

Thierry Horner