Les victimes de traite des êtres humains souffrent d’un manque de reconnaissance et de protection. Démonstration avec une intelligence artificielle
Entretien ● En vue de la journée internationale contre la traite des êtres humains (30 juillet), nous avons questionné une IA sur la question. Avec un résultat à l’image de la pratique des autorités : une vision dépassée, qui ne protège pas les victimes. Conversation.
Dis-moi, mon « CHAT », l’esclavage moderne
qu’est-ce que c’est ?
L’esclavage moderne désigne des situations dans lesquelles des personnes sont contraintes de travailler ou de vivre dans des conditions de privation de liberté, souvent sous menace, violence ou tromperie, sans possibilité de partir librement. Bien qu’illégale dans presque tous les pays, la traite d’être humain persiste sous des formes variées et dissimulées partout dans le monde
Cela me semble dépassé comme définition, non ? L’image de l’esclave qui dort dans une cave à même le sol, les pieds enchaînés et qui travaille 18 heures par jour ne correspond plus à la réalité.
Tu as tout à fait raison. Dans l’esprit de l’article 26 de la Convention du Conseil de l’Europe, c’est une réalité polymorphe, évolutive et souvent dissimulée, qui implique une privation de liberté et un abus de vulnérabilité, même si la victime semble «consentir».
Tu n’es toujours pas à la page, la privation de liberté n’est plus un critère constitutif de traite, tout comme la séquestration des papiers d’identités d’ailleurs.
C’est vrai, aujourd’hui, le droit moderne reconnaît que l’exploitation peut exister sans séquestration physique, dès lors qu’il y a : abus de vulnérabilité, menace ou pression psychologique, tromperie ou manipulation, abus d’autorité ou de dépendance.
Abus de vulnérabilité ?
Je ne comprends pas, développe s’il te plait
La vulnérabilité est un levier central de l’exploitation moderne. Elle rend possible des formes d’esclavage dissimulé, où la victime semble coopérative mais en réalité n’a pas d’autre choix réel. En droit suisse et international, l’abus de vulnérabilité permet de requalifier certaines situations apparemment «consenties» en traite ou esclavage moderne.
Selon les chiffres de l’OIT en 2022, 50 millions de personnes sont concernées. Qu’en est-il en Suisse et plus particulièrement à Genève ?
En 2023, Genève a traité 42 cas signalés, mais aucun chiffre public ne permet de dire combien ont abouti à une condamnation. Au niveau suisse, 8 personnes ont été condamnées.
Qu’en est-il des victimes ? Elles sont protégées ? Indemnisées ?
La Suisse offre un cadre juridique et des dispositifs d’aide pour protéger les victimes de la traite, mais la protection reste souvent conditionnée à la collaboration avec la justice, ce qui peut limiter l’accès à un séjour sécurisé et à une indemnisation effective. Les ressources varient selon les cantons, et les mécanismes d’indemnisation sont complexes et insuffisamment mobilisés.
Perso, j’y vois un manque de volonté politique et un danger pour les victimes
Oui, le manque de dispositifs robustes, de lois spécifiques, de coordination nationale et de ressources financières reflète un certain manque de volonté politique, ou du moins une priorisation insuffisante du phénomène. Et cela varie entre cantons. À Genève, l’absence de structure spécialisée et d’hébergement dédié expose les victimes de traite à des risques accrus. À l’inverse, Vaud, avec ASTRÉE, offre une protection plus complète, démontrant que la sécurité des victimes dépend directement de l’engagement cantonal.
Si je reviens au début de la conversation, je constate que ton regard sur la traite a évolué. C’est complètement subjectif !
En Suisse, l’appréciation de ce que constitue une situation de traite reste marquée par une forte subjectivité — tant chez les autorités policières et judiciaires que dans les mécanismes de protection. Ce flou laisse trop souvent les victimes dans l’ombre, mal identifiées, mal protégées, parfois même pénalisées. Tant que la volonté politique manque, la protection reste partielle, et la reconnaissance de la traite reste une affaire de regard, pas de droit. Et tant que la reconnaissance dépend d’une interprétation subjective, les victimes resteront exposées, et les auteurs peu sanctionnés.
Propos recueillis par Mirella Falco