Obligation d’annoncer les postes vacants : nouvelles pressions sur les chômeurs-euses ?

À compter du 1er juillet 2018, les employeurs-euses sont légalement tenu-e-s, sous peine de sanctions jusqu’à 40.000 francs, d’annoncer aux offices régionaux de placement (ORP) les postes vacants dans les professions où le taux de chômage national atteint au moins 8 %. Que signifie cette obligation d’annonce pour les chômeuses et les chômeurs ? A quoi faut-il être attentifs-ves ?

L’obligation d’annonce, c’est quoi ?
Cette mesure a été voulue par le parlement fédéral pour appliquer l’initiative « Contre l’immigration de masse » de l’UDC, acceptée en votation populaire le 9 février 2014. Plutôt que d’introduire des contingents, c’est la « préférence light » par l’obligation pour les entreprises d’annoncer les postes vacants des professions qui a été choisie. Selon ses défenseurs, cette mesure est censée profiter aux chômeurs-euses, qui seront informé-e-s en premier durant 5 jours de ces postes annoncés par les entreprises, et par là auront une longueur d’avance pour la candidature.

Le SIT est contre toute forme de préférence nationale, cantonale, indigène à l’emploi
Ce genre de mesure ne permet ni de lutter contre la sous-enchère salariale ni contre les licenciements, mais divise les salarié-e-s et légitime les discours qui stigmatisent les étrangers-ères et les frontaliers-ères comme étant les responsables du chômage. Alors que ce sont les patron-ne-s qui délocalisent l’emploi, licencient, décident des salaires à la baisse.

Une obligation qui risque de se retourner contre les chômeurs-euses
Non seulement cette obligation d’annonce ne résoudra pas le problème du chômage à Genève, mais elle risque également de se retourner contre les chômeuses et les chômeurs. Les conseillers-ères de l’ORP seront sous pression pour trouver des candidat-e-s pour ces postes. Pression qui risque d’être reportée sur les chômeurs-euses. Selon la loi, les chômeurs et les chômeuses doivent se tenir rapidement disponibles et suivre les prescriptions de l’ORP sous peine de pénalités et de suspensions des indemnités de chômage.

Comment ça marche ?

1. Les chômeurs-euses qui souhaitent bénéficier des postes découlant de l’obligation d’annonce sont tenu-e-s d’ouvrir un compte à leur nom sur www.travail.swiss, avec l’aide d’un-e conseiller-ère en emploi.

2. Dès la réception d’une annonce de poste vacant, l’ORP dispose de 5 jours ouvrables pour transmettre aux employeurs-euses des dossiers de candidat-e-s dont le profil correspond potentiellement au poste vacant.

3. Si le profil apparaît potentiellement adéquat, les chômeurs-euses peuvent éventuellement recevoir un téléphone, un sms ou un mail de l’ORP pour vérifier si le-la chômeur-euse donne son accord pour transmettre nom et profil à l’entreprise qui a annoncé un poste selon la procédure obligation d’annonce.

4. L’employeur sélectionne les personnes qu’il considère comme appropriées, les invite à un entretien d’embauche ou à un examen d’aptitude. Ensuite l’employeur informe l’ORP de l’issue de la procédure. Il n’a aucune obligation d’engager les candidat-e-s auditionné-e-s ou testé-e-s, ni de justifier son choix.

 La mesure étant nouvelle et le système informatique prévu pour faire « matcher » poste et profil encore peu performant, l’ORP considère qu’il s’agit lors de 5 jours d’une « proposition de poste » et non d’une « assignation à un emploi ».

Obligation d’annonce : à quoi faire attention ?

En principe, une « proposition d’emploi » de l’ORP, en cas de non intérêt ou de refus, ne donne lieu à aucune conséquence.

En revanche, dès lors que l’ORP évoque une « assignation à un emploi », il en est tout autrement. En cas de non présentation à un rendez-vous ou de refus de l’emploi, des pénalités sous forme de suspensions des indemnités sont prononcées.

 Tout-e chômeur-euse a intérêt à être attentif-ve aux risques de pression et de pénalités dans ses relations avec l’ORP

Motifs et ordre de grandeur des pénalités
Voici une liste non exhaustive des motifs les plus courants des pénalités, ainsi que leur ordre de grandeur :
• Non présentation à un rdv avec l’ORP (ex : l’ORP convoque par mail ou sms ou courrier pour un rdv d’urgence) : 5 à 8 jours de suspension la première fois ; 9 à 15 la deuxième fois ; dès le troisième rdv manqué examen de l’aptitude au placement.
• Inobservation d’autres instructions de l’ORP (ex : envoi de CV, de certificat de travail avec un délai déterminé) : 3 à 10 jours de suspension la première fois ; 10 jours la deuxième fois.
• Refus d’un emploi de durée déterminée dit « convenable » selon la loi ; la pénalité est proportionnelle à la durée de l’emploi ; 3 à 5 jours pour un emploi d’une semaine, 20 à 27 jours pour un emploi de 2 mois.
• refus d’un emploi de durée indéterminée dit « convenable » selon la loi : premier refus 31 à 45 jours ; deuxième refus 46 à 60 jours
• recherches insuffisantes pendant la période de contrôle : 3-4 jours la première fois ; 5 à 9 jours la deuxième fois.

Quelles sont les professions concernées par l’obligation d’annonce ?

La liste complète figure dans la rubrique check-up du portail www.travail.swiss, sous l’onglet « employeurs ».
Il s’agit principalement des professions qui correspondent aux postes suivants :
• accueil, réception, call center
• agriculture
• artistes
• construction (maçons, plâtriers, échafaudeurs, bétonneurs, ferrailleurs, etc)
• magasiniers, manutentionnaires et chauffeurs livreurs
• hôtellerie et restauration (personnel de cuisine et de services, gouvernantes mais pas les femmes de chambre)
• marketing et relations publiques

Défendre ses droits
Faire recours avec le soutien du syndicat
 Le SIT encourage les membres qui se voient infliger des pénalités légères ou lourdes à faire opposition dans les délais, car les chances de gagner ou d’alléger la pénalité sont réelles.
 Pour faire recours, se rendre à la permanence syndicale ou prendre rapidement rendez-vous avec le syndicat qui vous aidera à rédiger le recours.
Téléchargez ici le tract SIT.



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