Accueillantes familiales : une occasion manquée

La loi réglant l’exercice des accueillantes familiales (mamans de jour) avait été modifiée sur pression des milieux bourgeois dans le but de permettre deux modes d’engagement.

Le premier prévoit que les accueillantes familiales sont engagées comme salariées par une structure de coordination. Cela permet qu’elles soient enfin couvertes par les assurances sociales, qu’elles disposent de semaines de vacances payées et qu’elles puissent bénéficier de formation continue, notamment. C’est une juste contrepartie à la récente fiscalisation intégrale de leurs petits revenus. Pour les parents, cela permet de payer un tarif proportionnel à leurs revenus, ce qui est avantageux pour les familles modestes et relevant de la justice sociale. La structure de coordination se charge de l’encaissement des pensions et elle reçoit une subvention communale de fonctionnement, au même titre que les crèches par exemple. En cas de maladie ou d’absence de l’accueillante familiale, la structure de coordination aide à trouver une solution de remplacement afin d’éviter de mettre les parents dans la difficulté. Enfin, la structure de coordination joue un rôle important de suivi pour contrôler la qualité de l’accueil.

Mais la loi a aussi introduit la possibilité pour les accueillantes familiales d’exercer en qualité d’indépendantes. Toutefois, ce modèle ne fixe pas de tarification proportionnelle au revenu des parents, demande des démarches pas simples pour les intéressées qui ont de petits revenus (4 à 5 frs/heure/enfant) et, surtout, permet aux communes d’échapper au nécessaire subventionnement de ce mode de garde. Et quand l’accueillante familiale est malade, les parents galèrent pour trouver en urgence une autre solution.

La Ville de Genève refuse la structure de coordination

Les communes ont jusqu’au 31 décembre 2011 pour se mettre en conformité avec cette loi et son règlement d’application. Onex, Meyrin, Lancy, Vernier et Carouge par exemple ont joué le jeu et rapidement mise en place le modèle de structure de coordination. Cela a permis une importante reconnaissance pour les concernées et une amélioration de leurs conditions de travail. Par contre, le Conseil administratif de la Ville de Genève a décidé récemment de refuser la mise en place d’une structure de coordination sur son territoire. Résultat, 170 accueillantes familiales risque d’être larguées dans la nature dans quelques semaines. Beaucoup d’entre elles vont démissionner. Cela provoquera une perte de lieux d’accueil dans une situation de réelle pénurie et où 300 enfants devront déjà rester un an de plus en crèche comme conséquence de l’harmonisation de l’âge d’entrée à l’école obligatoire prévue par Harmos. Certaines d’entre elles seront sans doute tentées par un travail au noir, ce qui engendrera une perte de contrôle sur un mode d’accueil déjà trop isolé. Si la Ville de Genève souhaite à juste titre augmenter la capacité d’accueil dans les modes d’accueil du type crèche, elle ne peut pas continuer à ignorer ces femmes sous-payées par des parents en mal de place d’accueil. Chêne-Bougeries ou d’autres communes comme Versoix veulent aussi éviter de subventionner ce mode de garde. C’est un calcul à court terme qui, une fois de plus, se fera sur le dos de femmes qui contribuent à fournir des places et sur la qualité de l’accueil des enfants. Il n’est pas trop tard pour changer d’avis !

Valérie Buchs/SIT-info décembre 2011