Numéro de téléphone et réquisition : Retour du bon sens aux HUG

Concocté durant l’été dernier, un projet de modification des statuts du personnel des HUG prévoyait l’obligation pour ce dernier d’être joignable en tout temps. Après moult péripéties procédurales et à force d’interventions syndicales, le projet a finalement été sérieusement revu, limitant strictement l’usage du téléphone des salarié-e-s aux seules situations de catastrophe. Un retour au bon sens !

Se référant « aux buts assignés à l’établissement et aux nécessités de son fonctionnement », les HUG ont considéré qu’ils avaient besoin d’être en possession du numéro de téléphone de leur personnel. Bien que celui-là soit, dans l’immense majorité des cas, déjà à leur disposition – il semblerait que de rares employé-e-s n’aient pas annoncé leur changement de numéro ou l’acquisition d’un portable depuis leur engagement –, ils ont jugé nécessaire de se doter d’une base réglementaire pour s’assurer l’obtention de cette information. Mais attention, quelle base !

Un canon pour écraser un moustique

La proposition de la Direction ne visait pas moins, pour le personnel, que de se rendre atteignable « en tout temps », à la généreuse exception de périodes d’absence justifiées (vacances, service militaire, congé maladie ou accidents). Pour les HUG, à petit problème, grande solution : on n’a pas pour tout le monde un numéro de téléphone valable, alors on oblige tout le monde à se rendre disponible 24h sur 24 !

Un vrai rêve patronal

En dépit des propos, qui se voulaient rassurants, du Directeur expliquant que l’utilisation du téléphone privé devait rester exceptionnelle, le texte même de la modification statutaire ne pouvait laisser d’inquiéter un personnel trop habitué à se faire appeler par la hiérarchie pour se voir « proposer » des modifications d’horaire de dernière minute. Lors de la séance entre Direction et syndicats de la fin du mois d’août, bien qu’il se montrât incrédule quant aux possibles excès que dénoncèrent ces derniers, le Directeur a esquivé la fronde syndicale en renvoyant la question à la commission paritaire du statut.

Un imbroglio procédural

Si cette première intervention syndicale a permis d’empêcher l’adoption de la modification statutaire par le Conseil d’administration des HUG de la fin de l’été, elle posait le problème du renvoi de la discussion dans une instance qui n’a pas la compétence, de l’aveu même du Directeur, de modifier le statut. En effet, ce genre de modifications des statuts doit être discuté avec les partenaires sociaux lors des séances entre la Direction et les syndicats... Plutôt qu’un retour à la case départ, le Directeur a préféré poursuivre dans la voie de la commission paritaire. C’est ainsi qu’il a fait ratifier lors d’une séance boycottée par les représentants du SIT et du SSP, par la seule Associations des infirmier-ère-s, une nouvelle mouture.

Le bon sens finit par l’emporter

Il a fallu encore lancer une pétition et l’intervention énergique de notre représentante Daniela Neves, infirmière, au Conseil d’administration pour empêcher qu’il adopte la modification statutaire sans de réelles discussions avec les syndicats. Celles-là, que nous avons finalement réussi à provoquer, ont permis de trouver rapidement un consensus autour d’un projet qui continue d’exiger du personnel qu’il communique un numéro de téléphone valable, fixe ou portable, mais dont l’usage est désormais strictement restreint aux situations de catastrophe. Ce qui, pour tout-e soignant-e, est une évidence que de pouvoir être réquisitionné-s dans de pareilles circonstances. Ce retour au bon sens n’a pas empêché une nouvelle fois le SSP de faire volte-face au dernier moment et de finalement refuser, lors du Conseil d’administration de décembre, une solution qu’il avait pourtant acceptée quelques jours plus tôt en séance de négociations ! Ce qui n’a évidemment pas empêché cette fois l’adoption de la modification des statuts.

Une flexibilité horaire à combattre

Le retour formel au bon sens est toutefois un épiphénomène. La question de fond demeure la flexibilité horaire trop grande demandée au personnel, notamment soignant, pour pallier les manques ordinaires d’effectifs. Changements d’horaires, demandes de rajouter un horaire coupé, demandes de retour de congé pour pallier aux absences, difficulté à obtenir les vacances et les congés souhaités sont devenus des moyens trop courants, dans trop de services, pour faire face au manque d’effectifs. Le SIT répertorie cette dégradation et est d’avis qu’il est plus que temps de lancer une lutte du personnel contre la flexibilité horaire qui dégrade fortement les conditions de travail, qui oblige à être disponible en tout temps, sans égard pour la vie familiale et privée.

Julien Dubouchet-Corthay

Extrait de Sit-info de janvier 2012