Ce projet de fusion a été lancé dans un double contexte. Au niveau cantonal, il s’inscrivait dans le plan de mesures d’économie du Conseil d’Etat. Au niveau fédéral, lui faisait toujours fond l’étude de la motion dite Beck, du nom de son auteur, déposée en 1999 et relayée par une initiative parlementaire en 2003, qui exigeait la capitalisation à 100% des institutions de prévoyance de droit public, comme le sont la CIA et la CEH. Celles-là bénéficient en effet jusqu’à ce jour de la possibilité de fonctionner selon un système financier mixte (une part en capitalisation et une part en répartition) du fait qu’elles bénéficient de la garantie financière des corporations publiques qui les ont fondées. L’abrogation de l’article 69 alinéa 2 de la LPP aurait alors pour conséquence de devoir recapitaliser massivement ces caisses, dans un délai de dix ou vingt si l’on suit Beck, ce qui implique pour les caisses et/ou leurs fondateurs de dégager des revenus extrêmement importants.
Les revendications syndicales
Dans ce contexte initial de double menace sur les prestations, le Cartel intersyndical de la fonction publique et du secteur subventionné, avait lancé une pétition demandant à l’Etat :
le maintien des prestations actuelles,
le maintien d’un système mixte en primauté de prestations au financement faiblement capitalisé,
le maintien de la répartition actuelle des cotisations entre l’employeur et l’employé,
le maintien des structures démocratiques de représentation du personnel dans la gestion paritaire des caisses,
une affiliation du personnel des EMS obligatoirement à la CEH,
d’assumer entièrement les coûts de recapitalisation des caisses dans l’hypothèse où une modification législative fédérale ou cantonale viendrait à imposer un système de financement plus capitalisant que celui actuellement en vigueur.
Cette pétition qui avait recueilli 8’000 signatures et avait été déposée à l’automne 2007 a amené le Conseil d’Etat à répondre qu’il n’entendait pas remettre en cause les prestations. Et c’est dans cette dernière optique qu’a été élaboré un plan commun qui conserve globalement un niveau équivalent de prestations et sur lequel les partenaires sociaux peuvent tomber d’accord.
Une histoire de coûts
Tout irait donc pour le mieux si n’entrait en ligne de compte la problématique financière, qui prend deux formes. La première est d’ordre structurelle, liée au vieillissement de la population et à la modification du ratio actifs/pensionnés. La seconde est d’ordre conjoncturelle, liée à la très probable recapitalisation à venir du fait de la législation fédérale. S’il n’est pas encore tout à fait clair de savoir exactement ce qui reviendrait à l’une ou l’autre, ni même le total des deux, il est par contre évident que l’on va au devant d’un besoin important de financement. Et les derniers chiffres sur l’espérance de vie des membres de nos caisses tendraient à indiquer que l’on se dirigerait vers un besoin équivalent à 35 points de cotisations alors que la CIA part de 24% et la CEH de 21% (avec une première hausse de 3 points programmée pour 2012).
Le problème ici est que le Conseil d’Etat laisse entendre qu’il n’acceptera pas d’aller au-delà de 28%, et encore en ne finançant que la moitié des 4 points supplémentaires, et qu’il veut que le nouveau modèle de financement englobe à la fois les coûts structurels et conjoncturels. De la sorte, car il n y a pas plus de miracle en cette matière que dans d’autres, il s’agirait de revoir les prestations à la baisse et donc revenir sur le plan commun, ce que ne serait admettre sans autre les partenaires sociaux dont nous sommes.
Julien Dubouchet Corthay