Communiqué du 31 mars 2023
L’État devrait continuer à interdire à Uber l’exploitation plutôt que de lever la suspension.
Le SIT a pris connaissance du communiqué du Département de l’économie et de l’emploi de ce jour.
D’après le communiqué du DEE, 627 chauffeurs-euses ont accepté l’offre d’Uber. Il faut comprendre que cette acceptation ne veut absolument pas dire que l’offre était estimée juste par ces chauffeurs-euses. C’est seulement que, dans une pesée des démarches à faire pour obtenir leur dû, une majorité de chauffeurs-euses ont estimé préférable de prendre au moins ce qui était offert, surtout dans une situation économique restée très difficile encore dans les conditions actuelles, et qui ont carrément fait abandonner de très nombreux chauffeurs-euses qui ne s’en sortent plus.
Les 4.6 millions mis sur la table pour l’indemnisation paraissent un gros chiffre, mais cette grosseur est toute relative : il était censé couvrir toute la part de travail de frais professionnels non reconnus de plusieurs centaines de chauffeurs-euses pendant près de 3 ans.
Ramené à une moyenne, c’est environ 2’200 francs par année et par chauffeur-euse, soit des montants dérisoires. Parler de près de 10’000 francs pour les chauffeurs-euses ayant beaucoup roulé, alors que leurs créances se chiffrent sans doute en centaines de milliers de francs, montre le décalage. Ces sommes ne couvrent même pas les frais professionnels encourus pas les chauffeurs-euses.
Cette période a d’ailleurs été réduite par Uber pour ne couvrir que depuis le dépôt de la plainte de la PCTN, et non pas depuis le début des créances, qui échappent à l’indemnisation : en excluant les chauffeurs-euses qui avaient arrêté de travailler jusqu’alors, elle permettait à Uber d’augmenter le montant par km indemnisé sans augmenter la somme à débourser.
De plus, ce n’est même pas les 4.6 millions annoncés qu’Uber déboursera, mais 3.8 millions. Il avait mis une cautèle pour protéger ses intérêts : comme l’offre était calculée au prorata du nombre total de km, il y a un reliquat de km non réclamés, qu’il aurait fallu faire redistribuer aux chauffeurs-euses. Mais Uber a conditionné cette redistribution au fait que 90% des km entrent dans l’indemnisation. Or on est juste en-dessous, avec 83%. Ce faisant, Uber cherchait à pousser les chauffeurs-euses à accepter l’accord.
Entretemps, il a même fallu que le SIT se batte pour faire reconnaître les km, justement : nous nous sommes rendu compte, en étudiant les offres de nos chauffeurs-euses syndiqué-e-s, que dans une grosse proportion de cas, il manquait des km. Et que les petits malins d’Uber ne comptaient que les km genevois, soit faits uniquement dans le canton de Genève, comme si les chauffeurs-euses, à partir des limites du canton, se téléportaient... Nous avons finalement obtenu gain de cause, et un nouveau calcul, prenant en compte tous les km, est censé avoir été envoyé à tou-te-s les chauffeurs-euses.
Concernant les cas de rigueur, le nombre paraît très réduit, et il faut relever que l’information a été envoyée courant décembre avec des conditions, et notamment un délai au 31 décembre, qui n’ont sans doute pas permis à beaucoup de chauffeurs-euses de faire le nécessaire.
La conclusion du Département ne convient pas, et la suspension ne doit pas être levée. Uber est toujours une entreprise de transport, car il reste le donneur d’ordre, bien qu’il ait sous-traité sa gestion RH à une entreprise tierce. Même la décision du Département, annoncée entretemps, de considérer que MITC et Uber sont soumis à la loi sur la location de service, fait d’Uber une entreprise de transport.
Nous considérons donc qu’Uber reste dans l’illégalité, et qu’il serait temps que l’État l’interdise d’exploitation, plutôt que de tenter de le « réguler » dans un jeu interminable de chat et de souris.