Résolution des ferrailleurs de Genève

Réunis en Assemblée générale, ce 23 mars au soir, les ferrailleurs des entreprises, Lisi Construction SA et Oliveira Ferraillage SA, administrées et/ou dirigées par Messieurs Ilir Demiri et Shemsedin Demiri, et plusieurs dizaines de leurs collègues travaillant dans d’autres entreprises du ferraillage, constatent que :

- le secteur du ferraillage est un secteur sinistré depuis près de 20 ans maintenant en raison du système de sous-traitance sauvage qui a été mis en place à Genève par les entreprises principales et générales dans le secteur principal de la construction ;

- les entreprises ont abandonné depuis de nombreuses années ce domaine d’activité pas assez lucratif à leurs yeux et ont mis en concurrence une myriade de petites entreprises qui se livrent à une concurrence féroce pour arracher des contrats à n’importe quel prix ;

- pour empocher leurs marges sur des prix cassés, certains administrateurs de ces boites de sous-traitants ne reculent devant aucun moyen, n’hésitant pas à user de pratiques frauduleuses, voire mafieuses, telles que le non-paiement des salaires ou le versement de salaires de misère, la conclusion de faux contrats à temps partiel, l’organisation d’un travail sur appel illégal, la non-déclaration aux assurances sociales, l’organisation d’un travail au noir généralisé, des pressions et des menaces à l’encontre des nombreux travailleurs sans statut légal, qu’ils occupent et exploitent, la violation des droits syndicaux (licenciant tout travailleur qui se risque à vouloir défendre ses droits) , l’ usure, la traite des êtres humains, ou encore le déclenchement de faillites frauduleuses en cascade ;

- ce modèle d’affaires qui s’apparente en fait à un véritable esclavagisme des temps modernes est connu des autorités, de l’opinion publique et de l’ensemble des acteurs de la construction depuis de longues années en raison des innombrables affaires scandaleuses dénoncées par les syndicats, sans effet malheureusement, au vu des pratiques de Messieurs Ilir Demir et Shemsedin Demiri et des nombreux autres patrons du ferraillage qui sévissent tous les jours sur les chantiers ;

- I. et S. Demiri dirigent ou ont dirigé toute une nébuleuse d’entreprises composées de Lisi Construction SA, Oliveira Ferraillage SA, Oliveira Construction SA, Lisi entreprise Générale Sàrl, Demiri Construction Métallique, Oxha Group Sàrl, Shuma entreprise générale Sàrl, NB Metal Sàrl, en liquidation, en faillite ou en voie de l’être pour faire l’objet de poursuites notamment auprès des assurances sociales, des impôts, et de la SUVA pour plusieurs centaines de milliers de francs ; lien vers les extraits des offices des poursuites et lien vers l’extrait du registre du commerce ;

- malgré cela, les entreprises Lisi Construction SA et Oliveira Ferraillage SA, qui occupent plusieurs dizaines de travailleur dans de nombreux secteurs de la construction mais principalement dans le secteur du ferraillage continuent à travailler pour les plus grandes entreprises de la place pour la plupart membres de la Société suisse des entrepreneurs (SSE) ;

- la situation est d’autant plus scandaleuse que plusieurs travailleurs n’ont pas touché leurs salaires depuis de nombreux mois.
A l’occasion de leur Assemblée générale, les travailleurs des entreprises Lisi Construction SA et Oliveira Ferraillage SA ont par ailleurs témoigné qu’à la suite des arrêts de chantiers ordonnés ces derniers jours, les responsables d’Oliveira Ferraillage SA ont fait pression sur les salariés pour qu’ils renoncent à leurs contrats de travail pour signer un contrat de travail temporaire avec une agence intérimaire afin de détourner, avec la complicité de l’entreprise principale, la décision d’arrêt de chantier.
Lien vers la lettre à Oliveira Ferraillage SA

Enfin, ils ont appris avec consternation que Messieurs Ilir Demiri et Shemsedin Demiri n’avaient pas régulariser la situation de son personnel malgré l’interpellation des syndicats du 21 septembre. Lien vers la lettre à Lisi Construction SA

- vu les faits précités ;

- vu la situation de dumping social et salarial généralisée dans le secteur du ferraillage en raison de la guerre des prix qui y est pratiquée ;

- vu la situation de précarité absolue dans laquelle se trouvent plusieurs d’entre eux ;

- vu que l’écrasante majorité des ferrailleurs à Genève se trouve sans statut légal et que sans eux le secteur principal de la construction ne pourrait tout simplement pas fonctionner ;

- vu que la situation des ferrailleurs à Genève est indigne d’un Etat de droit et que les faillites frauduleuses généralisées dans leur secteur impactent l’ensemble de la collectivité ;

- vu l’urgence de rétablir enfin la Justice sociale dans cette affaire qui revêt pour le surplus un intérêt public manifeste.

Les travailleurs des entreprises Lisi Construction SA et Oliveira Ferrailleurs SA, avec ou sans permis de séjour, unis et solidaires, avec le soutien de leurs nombreux collègues d’autres entreprises usant de même pratiques, décident de mandater les syndicats Sit, Syna et Unia pour :

- exiger des entreprises membres des associations patronales qu’elles internalisent le secteur du ferraillage au sein de leurs entreprises et que, dans l’intervalle, elles revalorisent immédiatement le prix de la pose de la ferraille par leurs sous-traitants, privilégiant enfin les conditions de travail à leurs seuls intérêts économiques ;

- exiger une nouvelle fois des entreprises principales et générales qu’elles bloquent tout paiement à Messieurs Demiri jusqu’à rétablissement complet des droits des travailleurs et qu’elles cessent leurs manœuvres dilatoires pour se soustraire à leurs obligations ;

- demander au Conseil d’Etat de convoquer immédiatement une séance de crise entre les partenaires sociaux pour trouver une solution rapide au présent conflit mais également à la situation scandaleuse qui règne depuis trop longtemps maintenant sur les chantiers genevois ; situation indigne d’un Etat de droit ;

- demander au même Conseil d’Etat d’intervenir auprès du Secrétariat d’Etat aux migrations pour négocier la délivrance d’une autorisation de séjour et de travail aux ferrailleurs sans statut, seule solution à même de leur permettre de défendre leurs droits et sortir de la précarité, eux qui participent activement à la construction de ce pays en exerçant un des métiers les plus durs qui soit, étant précisé encore que leur activité revêt un intérêt économique évident ; lien vers la lettre à la Conseillère d’Etat Madame Fabienne FISCHER.

En même temps, les travailleurs donnent mandat à leurs syndicats pour organiser toute mesure de lutte utile à leurs côtés, que ce soit par la voie d’une dénonciation publique, de plaintes pénales, ou encore d’actions sur les chantiers y compris un mouvement de grève.

Résolution votée à l’unanimité le 23 mars 2023.