Une initiative en faveur des droits politiques des personnes étrangères aux niveaux municipal et cantonal est lancée dans le canton de Genève.
A vos stylos · L’initiative « Une Vie ici, une voix ici : renforçons la démocratie » réclame que les personnes étrangères résidant à Genève aient droit, après 8 ans de résidence, de voter, d’élire et d’être élu-e-s aux niveaux communal et cantonal. Cette réforme démocratique élémentaire est d’autant plus indispensable dans le canton le plus multiculturel de Suisse. Dans le canton de Genève, 40% de la population n’a pas la nationalité suisse. En Ville, ce taux frôle même les 50%. Aujourd’hui, ce sont 88’506 personnes qui vivent ici, travaillent ici et paient leurs impôts ici et qui n’ont pas le droit d’exprimer leur avis sur des sujets qui les concernent. Une communauté qui ne donne qu’à une moitié de sa population la possibilité de s’exprimer peut-elle encore être qualifiée de démocratie ?
Distinguer citoyenneté et nationalité
On entend parfois à tort que les étrangers-ères qui veulent donner leur avis « n’ont qu’à se naturaliser ». Pourtant, acquérir la nationalité suisse n’est pas possible pour tout le monde. Ça l’est d’autant moins que l’accès à la naturalisation est rendu toujours plus difficile. En effet, l’exigence récente du « permis C » pour être naturalisé rend la nationalité inaccessible à de nombreuses personnes titulaires de permis B ou F. Dans un autre registre, les travailleurs-euses de la Genève internationale n’y ont pas accès non plus. Il est grand temps de distinguer nationalité et citoyenneté, deux mots loin d’être synonymes.
Une bataille syndicale
A l’inverse de ces mots, démocratie et syndicalisme sont clairement synonymes. La lutte en faveur des droits syndicaux, sociaux et politiques pour toutes et tous s’inscrit clairement dans la longue liste des batailles en faveur de plus de démocratie, de l’abolition du travail des enfants à la lutte en faveur du droit de participation dans les entreprises. Et parce bon nombre de droits des travailleurs-euses se discutent au parlement plutôt qu’au sein des entreprises, il est juste que les travailleurs-euses puissent avoir leur mot à dire, quel que soit la couleur de leur passeport. Pour le SIT, syndicat qui compte XX% de membres n’ayant pas le droit de vote à Genève, cette affirmation est d’autant plus vraie.
Un nouveau pas vers plus de démocratie Les libertés et les droits fonctionnent ainsi : plus on les partage et plus on les renforce ! Au long de son histoire, la Genève gouvernée par une petite élite masculine et religieuse a cédé du pouvoir à la population au rythme des révoltes populaires… De la révolution de 1792 qui proclame l’égalité politique de tous les citoyens à la Constitution de 1842 qui abolit le suffrage censitaire et passe au suffrage universel masculin. Il faudra ensuite attendre 1959 pour voir Genève octroyer – enfin ! – le droit de vote et d’éligibilité aux femmes aux niveaux cantonal et municipal et 2008 pour le droit de vote des résident-e-s étrangers-ères au niveau municipal. Loin d’affaiblir les droits de ceux-celles qui les ont déjà, tous ces élargissements des droits politiques ont contribué à augmenter les droits de toutes et tous. L’initiative « Une Vie ici, une voix ici » s’inscrit clairement dans la lignée de toutes ces batailles démocratiques, à Genève comme ailleurs. Il est aujourd’hui grand temps de changer à nouveau les règles du jeu afin de faire un nouveau pas en direction d’une véritable démocratie. Signez et faites signer l’initiative !
Julien Repond pour SITinfo