Communiqué de presse - 29 novembre 2009
Défaite par les urnes aggravée par une inquiétante atteinte au vivre ensemble
C’est avec tristesse et effarement que la Coordination contre l’exclusion et la xénophobie (StopEX) a pris connaissance de l’acceptation par le peuple et des cantons de l’initiative anti-minarets. Cette victoire de l’intolérance et de la haine laissera pour longtemps des traces lourdes de conséquences qu’il est encore difficile d’évaluer aujourd’hui. La majorité du peuple, redoutant une atteinte à l’identité suisse, a en fait, par son approbation, amorcé un changement des plus inquiétants : l’islamophobie figurera en toutes lettres dans la Constitution, laquelle contiendra désormais un article clairement discriminatoire. C’est un signal très négatif que notre pays envoie au monde.
Par ailleurs, pendant cette campagne, alors qu’elle n’avait fait l’objet d’aucune attaque depuis sa construction en 1978, la mosquée de Genève a été vandalisée à trois reprises. Dans un journal sous la responsabilité d’un conseiller national, un article a appelé à l’expulsion en masse de tous les musulmans1. Est-ce là le débat prétendument sain que voulaient ouvrir l’UDC et l’UDF ? Peu de questions constructives sur la place de l’islam et des musulmans dans notre pays ont été soulevées, et le débat a rapidement dérapé vers une vaste caricature faite de provocations, d’amalgames, d’exagérations voire de mensonges.
Les Chambres fédérales n’auraient jamais dû accepter que soit soumise au peuple une initiative dont l’application pousse la Suisse à enfreindre sa Constitution et ses obligations au regard du droit international, à en croire les dernières recommandations que le Comité des Droits de l’Homme a adressées à la Suisse2. Les autorités fédérales auraient dû éconduire des initiants qui n’avaient pas pour but d’interdire une construction prétendument nuisible, mais bien de déblatérer des discours haineux et d’afficher des images choquantes, pour stigmatiser et discriminer une nouvelle fois toute une partie de la population, utilisant comme toujours la peur de l’autre pour faire parler d’eux.
Malgré le fait que nombre important d’acteurs du monde politique, syndical, associatif et religieux se soit prononcé contre cette initiative et l’ait combattu avec force, la Coordination ne peut que regretter l’extrême mollesse dont a fait preuve la plupart des partis politiques. Ceux-ci, bien qu’officiellement opposés à l’initiative, ont semblé hésiter tout au long de la campagne à la combattre frontalement.
Les médias, surtout audiovisuels et radiophoniques, ont par ailleurs joué un rôle étonnant dans cette campagne en offrant une tribune démesurée aux provocations des milieux xénophobes, contribuant ainsi à instaurer un débat sur la menace prétendue de l’islam plutôt que sur la prise en otage des outils de démocratie directe par le populisme nationaliste et raciste. Personne ne sort vainqueur d’un exercice électoral aussi caricatural. Au contraire, des fractures nouvelles sont apparues dans notre société fière de sa diversité ! Il est grand temps de mettre fin à une réelle stratégie de sape d’un modèle de société fondé sur la tolérance et le respect de l’altérité et permettant le « vivre ensemble », dans la diversité culturelle et d’origine. Tel est l’irréversible destin de nos sociétés, dans le cadre d’une mondialisation achevant de mettre en contact des civilisations qui ne peuvent plus s’ignorer.
Le comité de StopEX www.stopexclusion.ch
Communiqué de StopEx au format PDF
(La Coordination contre l’exclusion et la xénophobie est composée d’une quarantaine d’organisations et de membres individuels attachés à la défense des droits des migrant-e-s, des étrangers, des demandeurs d’asile. La liste complète de ses membres ainsi que d’autres informations utiles sur ses activités est disponible sur son site internet.)